Un parc.

Le bal de fin d'année est la semaine prochaine et, comme d'habitude vu que tu ne peux pas t'empêcher de foutre tes farces maison partout, tu as eu une foule d'admirateurs en furie qui veulent en découdre avec toi. Tu ricanes en regardant autour de toi ; tu es censé te retrouver au Bâtiment Administratif mais, comme d'habitude, ça n'a pas marché.

Un parc.
De mieux en mieux...

Tu fais un mouvement classieux des cheveux, ton appareil photo numérique pendant autour du cou, ton sac avec ton matériel plus pro sur le dos, tu arques un sourcil amusé quand la pluie se met à tomber et tu offres même ton visage au ciel. Tu ranges ton appareil dans ton tee-shirt, caché par ton sweat à capuche. Mains dans les poches de ton ample pantalon qui te tombe un peu des hanches - non que ça se voit vu le sweat volontairement trop grand que tu portes -, tu continues de marcher, prêt à dégainer à la moindre occasion.

Sauf que ce n'est pas ce type d'occasion qui se présente à toi.
C'en est une que tu essaies d'oublier.

- ... Nina ?

La petite soeur d'Alix.
Aïe...

Tu ne lui as jamais parlé, enfin pas directement, en revanche Alix t'a énormément parlé de sa petite soeur. Du fait qu'elle t'a d'abord pris pour un psychopathe, aussi. Un sourire triste étire tes lèvres à cette pensée mais tu ne t'en formalises pas plus que tu ne t'y attardes. Inutile d'évoquer le fait que Alix a plié bagages du jour au lendemain et qu'elle ne t'a pas prévenu, ne t'a pas donné un moyen de la contacter, ne te répondait pas plus. Rien, nada. Est-ce que tu l'as mal pris ? Non. Ta philosophie ne te permet pas autre chose que de te dire que c'est arrivé une fois de plus. Tu n'as pas de temps à perdre en vaines récriminations. Ni en pensées inutiles, dans le cas présent.

Ça ne t'atteint pas, c'est ça Neal ?
Menteur...

Tu poses un genou à terre devant la boule nommée Nina et tu poses, d'instinct, une main sur son épaule. Si tu peux l'aider, quelle qu'en soit la manière... tu vas pas t'en priver.

- Hey, qu'est-ce qui ne va pas... ?

- Hey, qu'est-ce qui ne va pas ?

Tu es déjà à un doigt de la prendre dans tes bras mais tu n'en fais rien. Tu ne sais pas ce qu'elle a, ton geste pourrait être outré, et le faire inconsciemment quand tu peux l'éviter, très peu pour toi. Rien que son couinement, ou son "oui" selon le point de vue, de tantôt suffit pour t'aiguiller. Une main douce sur son épaule, tu essaies de capter son regard... qui disparaît dans ton buste. Un léger rire t'échappe, tendre, et tu la serres dans tes bras ; l'amènes dans ces étreintes pleines de chaleur et de réconfort dont tu as le secret. Tu ne dis rien quand elle se blottit contre toi, te contentes de l'accueillir et de lui offrir le nid le plus douillet qui soit. Le silence que tu instaures n'est pas pesant, du moins tu l'espères ; c'est un silence patience. Un silence attente. Tu tiens à sa réponse - sinon tu n'aurais pas posé la question - et à savoir comment tu peux l'aider.

... Neal...
Pourquoi ?

- Mon petit ami est parti… sans me prévenir… et il répond plus… et ma sœur aussi…je ne sais même pas pourquoi….

Il n'y a pas de réponses exactes à ça, ou du moins tu ne les as pas. Et tu cherches l'une d'elles, c'est dire à quel point tu ne les as pas. Pourtant, tu as tout un tas de phrases bateau à lancer qui, même si stéréotypées, sont vraies. C'est la vie ; soit tu avances, soit tu prends un temps pour t'asseoir et te reposer, soit tu fais du demi-tour, soit... tu tombes. En t'écartant de ton chemin, en trébuchant dessus ou en chutant dans le gouffre sans fond qui est là, à côté, et qui attend. Qui t'attend. Tu en as plein, des trucs comme ça à dire. Est-elle prête à cimenter ses souvenirs et à simplement attendre d'avoir une explication, quand ceux qu'elle cherche accepteront de lui en donner une ? Au fond, cette question est un dérivé d'une des questions phares. Veux-tu avancer ou chuter, Nina ? Un poil trop philosophique, vu son état. Alors, spontanément, tu embrasses ses cheveux et passes ta main libre, toujours douce, dans son dos, la faisant glisser au milieu de ses omoplates en un geste rassurant. Tu ne sais pas si elle est prête à entendre ces phrases et à avoir les réflexions qu'elles emmènent avec elles alors tu optes pour la spontanéité. Et l'option taire ta franchise parce que, franchement, ton honnêteté n'est pas toujours un cadeau.

- Je ne sais pas ce que je dois faire non plus… Pardon…

Tu souris et, déplaçant légèrement tes appuis, tu la soulèves d'un bras. En espérant qu'elle ne va ni paniquer ni t'étrangler. De ton bras libre, tu sors un mouchoir en tissu - propre évidemment - de ton sweat. Peut-être qu'elle reconnaîtra les goûts d'Alix dans ce mouchoir, de la matière aux couleurs et aux motifs ; et ce serait parfaitement normal, vu que c'est Alix qui t'avait demandé de lui en faire un. Juste avant de disparaître.

- Ne t'excuses jamais d'être humaine. Souffles ta voix douce dans ses oreilles, ta main libre lui tendant ledit mouchoir. Le doute est une force, princesse. Veilles simplement à ce qu'elle te pousse vers l'avant.

Quel que soit l'avant en question. Parfois, aller de l'avant signifie faire demi-tour, tomber ou encore se blesser. Finalement ton instant philo est sorti, Neal. Et tu essaies de duper ton monde en te faisant passer pour un crétin de service, hein... Même Alix avait su voir à travers ton masque d'incapable. Il faut dire que les circonstances de votre rencontre ne t'avaient pas laissé le choix. Oui. Tout à fait. Ton masque n'était absolument pas tombé parce que tu le voulais. Bien sûr que non. Comme une éponge, tu prends l'anxiété de Nina sur toi, la gardant dans la chaleur de ton étreinte, tout en marchant vers un petit kiosque où tu vois un banc. Tu t'y assois sans la lâcher, ayant fait un petit détour par une machine pour lui donner un chocolat chaud en prime. Ça ne vaut pas ceux dans des salons de thé ou autres magasins de cette île sophistiquée... mais ça égale aisément un chocolat chaud maison. Tu attends donc qu'elle s'installe confortablement sur tes cuisses, tout en lui laissant l'opportunité de se déporter si l'envie lui prend, avant de lui tendre son gobelet.

Pourquoi.
Pourquoi tu te meurtris comme ça, Neal...

- Merci...
- My pleasure, princess.* Réponds-tu en souriant.

Tu n'esquisses aucun geste pour reprendre le mouchoir, estimant que tu le lui as donné et qu'il ne t'appartient donc plus. Si tant est qu'il t'ait appartenu à un moment vu que tu n'as pas un seul instant imaginé ce scénario-là. Quant à ses larmes... aurait-elle été une parfaite inconnue que tu aurais sans doutes fait ton félin. Sauf que ce n'est pas le cas.
De la tenue, Neal.

***

Tu la regardes s'installer confortablement sur toi et boire le chocolat chaud que tu lui as tendu avec un sourire satisfait au coin des lèvres, le tout en hochant ta tête pour l'encourager. Tu regardes ses améthystes et tu ébouriffes gentiment ses cheveux, d'une main tendre, à sa question.

- T'en veux ?
- Il est pour toi, princesse. Dis-tu, ponctuant tes mots en secouant ta tête d'un geste léger, tendre et furtif. Et je n'ai pas soif, ni froid, alors régales-toi. Tu en as plus besoin que moi.

Tu laisses sa tête reposer contre ton torse, gardant une main dans ses cheveux et fermant tes yeux. Le bruit de la pluie t'apaise, sans doutes parce que tu n'as aucun souvenir d'Alix sous la pluie. Il n'a jamais plu quand vous vous voyiez. Il a neigé, venté, la couverture nuageuse pouvait être présente ou non, mais il n'a jamais plu. Tu rouvres tes paupières quand tu sens un regard sur toi et tu penches ta tête sur le côté - droit.

- Qui es-tu ?
- Neal Malo le psychopathe. Tu sais, celui qui kidnappe les gens dans des volcans le jour de la saint Valentin.

Oui oui, Alix t'avait raconté celle-là. Tu souris, d'une façon montrant bien que tu ne lui en veux aucunement, que tu ne fais qu'utiliser les mots qui sont le plus susceptible de l'interpeller. D'une façon montrant bien aussi qu'elle n'a pas besoin de perdre son temps à t'accorder de la pitié ; tu n'en as pas besoin. Ce n'est pas sa pitié qui fera revenir une disparue, de toutes façons.

- T'as froid, princesse ? Ou faim ?

*prononcé avec un accent londonien tip top perfect, le genre d'accent qui te fait dire "toi t'es pas français", à tort ou à raison vu que l'accent français de Neal est tout aussi irréprochable.

- Je vous le laverais au besoin.
- Te. Réponds-tu gentiment. Et gardes-le, princesse. Il est à toi.


Tu regardes du coin de l'oeil son faciès, posé contre toi, quand tu lui révèles qui tu es et tu manques de rire. À la place, tu pouffes légèrement, amusé, enjoué mais nullement moqueur. Quoique, peut-être un peu mais certainement pas méchamment. Tu lui souris simplement quand elle te regarde, levant un doigt pour caresser une de ces rougeurs.

- Ne bouges pas. Souffles-tu.

Libérant doucement ton appareil photo d'une main, tu cesses d'effleurer sa joue et tu la prends en photo. Tu regardes ce que ça donne et tu souris, content de ce que tu as su capturer. Le message que tu as fait passer dans ton sourire, qui reste indemne, semble être bien passé à en juger par ce que tu captes dans ses yeux - de ce que tu en captes vu que les tiens sont tournés vers la photo que tu viens de prendre, l'analysant sous toutes ses coutures. Tu ranges ton appareil photo et lui demandes implicitement si elle a prévu autre chose que de te koalater - ce qui ne te pose, au demeurant, aucun problème - et la moue qui te répond te fait rire tendrement.

- Surtout froid.
- No probs*, ça peut s'arranger très vite.

Tu ranges ton appareil dans ton sac, comme si tu le caressais et le manipulais avec une infinie délicatesse, puis tu reviens dans ta position initiale pour mieux refermer tes bras autour d'elle et la serrer contre toi. Tes oreilles se concentrent sur le son de la pluie, éclipsant ainsi une à une les nombreuses pensées, réflexions et mêmes souvenirs s'accumulant dans ton esprit, jusqu'à ce que la pluie soit la seule chose à laquelle tu penses. La pluie et la personne que tu serrais chaleureusement contre ton coeur.

- Mais tu es confortable et tout chaud, alors ça aide un peu.
- Ravi de l'apprendre. Ris-tu, enjoué.

Tu embrasses tendrement ses cheveux, au sommet de son crâne, puis pose ton visage dedans de manière tout aussi tendre. Une de tes mains se meut en un geste apaisant sur le dos de Nina et tu laisses le silence agir, notant dans un coin de ton esprit une idée de photo - qui demanderait, cela dit, quelques préparatifs supplémentaires. Tu finis par sourire contre sa masse brune - très bien entretenue, soit dit en passant ; tu as une idée.

- Dis-moi, est-ce que tu aimes danser ? Si oui, ça te dit d'aller à une salle d'arcades ? Ils ont des jeux de danse géniaux ! On peut faire autre chose, aussi.

Tu te redresses, sans cesser de la serrer contre toi. Tu veilles à desserrer ton emprise si d'aventure elle souhaiterait se détacher de ce cocon chaleureux que tu as créé et dont tu as à peine conscience d'avoir créé. Tu essaies de capter son regard et, une fois que c'est fait, tu ajoutes :

- On peut très bien rester comme ça si tu préfères, hein, pas de soucis pour moi. Tout me va.

Tu ponctues ta dernière phrase d'un clin d'oeil.

Tu attends qu'elle te réponde, la considérant de tes yeux paisibles. Tu en profites pour poser et étendre ta jambe sur le banc, en faisant des micro-mouvements, pour travailler tes pointes et l'étirer un peu. Tu glisses de l'autre côté du banc pour en faire de même avec ta jambe gauche quand elle te répond.

- Mmh… c’est que… je suis bien moi là… T’es comme un plaid.

Tu ris de bon coeur, même si le son est étouffé par tes lèvres closes. Tu ne diras absolument pas que Alix avait coutume de te confondre avec un matelas, un coussin ou son lit. Tu expires brièvement par le nez, un sourire aux lèvres, mais tu ne réponds pas plus en avant. Il n'y a rien à ajouter. Tu poursuis tes étirements passifs sur ta jambe gauche en la serrant légèrement plus contre toi, la déportant légèrement plus sur ta jambe droite pour des raisons évidentes.

- Mais… je pense que ce serait mieux qu’on aille autre part pour ne pas que tu tombes malade…

Tu éclates de rire.

- Mais c'est que madame est entreprenante ! Tu marques une pause, le temps que ton hilarité cesse en quelques seconds. J'te taquine. Et t'en fais pas pour moi, va, j'ai connu pire.

Comme survivre en étant dans un putain de supervolcan ou sur la banquise de l'Antarctique. Ton don avait déconné mais tu n'y étais pas resté longtemps ; juste le temps de te retrouver dans ta chambre, mouillé en étant complètement frigorifié. Tes parents avaient mis le reste de la soirée et la nuit pour te réchauffer, après s'être assurés grâce à un de leurs amis que ta vie n'était pas en danger. Et ça ne t'empêche pas de toujours te téléporter dans ton lit quand tu sors d'une douche et d'avoir quelques fois des écarts ; ce pourquoi tu te mets toujours une serviette sur les reins désormais. Simple précaution. Tu expires longuement en souriant, modifiant tes appuis dans l'intention de te lever en la gardant dans tes bras.

- Je peux te demander...
- Non. réponds-tu avec un regard joueur.
- tu es anglais ?
- Nope, j'suis breton. Français, quoi., réponds-tu avant qu'un sourire malicieux et qu'un léger rire, doux, ne se fasse entendre. J'ai des origines galloises, tho'*.

Tu te redresses donc en la gardant dans tes bras, puis tu la regardes longuement avant de lui sourire, simplement.

- Je viens d'y penser mais... tu veux peut-être marcher sur tes propres pieds, princesse ? Dis-le si c'est ça.

La pluie s'est calmée, s'étant transformée en bruine entre temps, et c'est donc naturellement que tu diriges vers le campus. Tu n'as pas l'intention de prendre le bus, Merille n'étant qu'à une demi-heure de marche au pire, et, comme un gamin, tu t'amuses à sauter dans les flaques en riant.

- T'as un endroit particulier en tête ? Parce que je vais au BAM, moi. Lui demandes-tu en penchant légèrement ta tête de côté.

Le tout en sortant de la flaque. Tu aimes sauter dedans mais tout de même, tu ne vas niquer les baskets que tu as durement fabriquées aussi aisément. Même si elles sont imperméables et imperméabilisées, tu as juste fortuitement oublié ce détail.

Ça le fait rire, son rire est aussi chaleureux que lui… Du moins c’est ce que tu trouves. Tu ne pus retenir un léger rougissement quand tu l’entendis dire :

- Mais c'est que madame est entreprenante !. J'te taquine. Et t'en fais pas pour moi, va, j'ai connu pire.

-Pff ! C’est pas une raison pour tenter le diable !

Oui, tu étais têtue et alors ?  Tu hausses légèrement les sourcils quand tu entends qu’il soupire. Même si c’est en souriant, tu te demandes pourquoi.
Tu l’as vu s’étirer plusieurs fois, et désormais, il se lève doucement en te gardant dans ses bras, tu ne vas pas t’en plaindre, mais tu n’es pas sûre d’être en droit d’en profiter.
Quand tu commenças à lui dire :

- Je peux te demander...

Et qu’il te répondit :

- Non.

D’un regard joueur, tu gonflas les joues avant de continuer quand même ta question. Tu ne t’attendais ceci dit pas à la réponse qui allait suivre :

- Nope, j'suis breton. Français, quoi. J'ai des origines galloises, tho'*.

Ouai, il avait vraiment un sourire craquant.  Tu le regardas en haussant un sourcil : pas sûre de savoir s’il se moquait de toi ou non, du coup, tu préféras ne rien ajouter.
Après s’être alors mis à marcher le jeune homme te demanda :

- Je viens d'y penser mais... tu veux peut-être marcher sur tes propres pieds, princesse ? Dis-le si c'est ça.

Tu acquiesças timidement :

-Je pense que ce serait mieux.

Pour toi comme pour lui. Fallait-il le dire, tu avais peur d’être trop lourde. La pluie s’était désormais calmée, ce n’était pas plus mal.
Tu jettas de temps à autre un coup d’œil à Neal de temps à autre : il sautait dans les flaques, c’était amusant.
Tu marchas à ses côtés, te sentais un peu mieux au côté du jeune homme. Tu le tenais par la manche, tout en faisant attention de ne pas être mouillée.
Le jeune homme te dit :

- T'as un endroit particulier en tête ? Parce que je vais au BAM, moi.

-Le Bam ? demandes-tu surprise avant d’ajouter, non je sais pas… je connais un salon de thé mais je n’ai pas envie d’y aller… mais j’aimerai bien un chooclat chaud. Tu connais un endroit où on peut boire un bon chocolat chaud en dehors d’un salon de thé ?

Trop de bons souvenirs qui deviennent des souvenirs tristes au salon de thé sinon. Toujours est-il que suivrai Neal ou qu’il aille. C’était un peu ton seul repère au milieu de cette mer de tristesse.

Si elle ne réagit pas mal à ton rire, la suite semble la laisser aussi indignée que perplexe. À moins que ce ne soit juste de l'obstination, ce qui te fait doucement rire. Alors même qu'elle formule ses émois et que tu dégaines ton appareil pour immortaliser sa moue.

- Pff ! C'est pas une raison pour tenter le diable !
- Ni pour déconstitutionner Chuck Norris en faisant la sourde cuisse.

Tu lui réponds sur un ton neutre, clair, sérieux tout en examinant ta prise sous tous les angles possibles. Tu prends aussi le soin de ne laisser aucune perle d'eau s'approcher de ton appareil photo. Ton examen fini, tu hoches la tête avec un petit air satisfait, prends une photo de son gonflage de joues sur moue boudeuse, refais le même examen puis tu ranges ton appareil sous ton sweat. C'est après t'être redressé, ta princesse toujours dans les bras, que tu te rends compte qu'il aurait peut-être mieux valu lui demander si elle veut retrouver l'action de marcher ou non.

- Je viens d'y penser mais... tu veux peut-être marcher sur tes propres pieds, princesse ? Dis-le si c'est ça.
- Je pense que ce serait mieux.
- Tu penses, hein... Fais-tu d'un ton moqueur avant de rire de bon coeur, signe que ton malice a simplement frappé, sans attaque aucune.

Tu la poses au sol et, sans transition, tu sautes dans les flaques d'eau en mettant volontairement l'agilité et la concentration d'un enfant de quatre ans remplissant la mission de sa vie. Tu ris comme le gosse que tu es, agitant puérilement le bras qu'elle tient d'avant en arrière tout en s'adaptant au rythme de sa démarche. Tu sautes à pied joint dans une flaque, marques un temps d'arrêt où tu la regardes pour enchaîner une série de haussement de sourcils classieux avant de sortir de la flaque en riant de bon coeur. Tu reprends une marche normale et, avant de te mettre à errer sans but tout en sachant pertinemment où tu vas, tu clarifies de suite tes pensées.

- T'as un endroit particulier en tête ? Parce que je vais au BAM, moi.

Tu penches légèrement ta tête de côté, attendant une réponse qui fuse. Sa surprise réveille une lueur aussi amusée que déterminée dans ton regard et, sans même la consulter, tu décides donc de ne pas changer de destination. Le BAM est la destination, de toutes façons.

- Le Bam ?
- Le Bar Associatif de Merille.
- Non je sais pas… je connais un salon de thé mais je n’ai pas envie d’y aller… mais j’aimerais bien un chocolat chaud. Tu connais un endroit où on peut boire un bon chocolat chaud en dehors d’un salon de thé ?
- Le Bam. Réponds-tu en riant.

Tu glisses ta main autour de la sienne, te rapproches d'elle pour glisser le tout dans la poche ventrale de ton sweat. Spontanément. Tu dessines ta mâchoire de ta main libre, repassant la conversation dans ta tête avant qu'une ampoule ne s'allume dans tes yeux.

- Je viens d'y penser mais en fait... vu mon don, je peux nous y emmener de suite. Et vu l'heure, ... tu n'as aucune idée de l'heure qu'il est mais ce n'est qu'un léger détail technique... ça sera calme. Le calme du BAM est plus dû au fait qu'on est dimanche mais, encore une fois, ce n'est qu'un léger détail technique. Je te préviens, ça risque de te coller une nausée ou un mal de crâne légers. Voire les deux. Ça passe assez vite mais si tu préfères marcher, on peut marcher. Ou prendre le bus. Dis-tu avec un sourire léger, avenant.

Tu fais jouer tes épaules deux secondes, puis étires lentement ta nuque en des mouvements fluides. Tu fronces brusquement les sourcils ; une pensée vient de te traverser.

- Déconstitutionner Chuck Norris, c'pas mal ça... Parfois j'aime mon cerveau. Termines-tu en riant autant de bon coeur que moqueusement - par auto-dérision.

Tu es passé du coq à l'âne ? Oh, si peu. Tu as déjà fait largement pire mais tu préfères ne pas t'en rappeler. Te rappeler quoi ? Comment déconstitutionner Chuck Norris, parfaitement. Alors... Tes yeux se perdent dans le vide - tout en restant conscients de ce qui t'entoure - tandis que tu montes un plan improbable, rocambolesque mais extrêmement pointilleux et logique dans ton esprit. Un sourire de gamin-espion-détective éclaire ton visage. Alors, voyons voir...