Rompre le calme de la Perlée

La petite louve ayant été ramenée en sécurité, la Bête n’avait plus besoin de repousser sa chasse. Tournant rapidement les pattes, il se mit, au petit trot, à parcourir la forêt, à la recherche d’une proie. Malheureusement, la louveteau avait fait fuir absolument toutes les créatures que cette forêt possédait, et la chasse du prédateur s’en retrouva raccourcie. Heureusement il ne dépendait pas essentiellement de cela pour survivre, il se contenta donc de prendre la décision du fainéant. Tournant ses pattes jusqu'à la plage qu’il savait vite à cette heure de la journée, à savoir le crépuscule, il se dirigea vers l’eau. Après avoir humé les embruns, il posa ses fesses sur le sable, et entrepris sa transformation.
Sous la douleur, ses pattes griffèrent profondément le sable, et bientôt ses doigts empoignèrent une large portion de sable. Puis, une fois que son museau écumant de douleur eut disparu, un léger râle de douleur mi animal, mi humain s’échappa de ses lèvres, un « Ah ! » de douleur, tandis que son dos terminait de se briser et de se réimbriquer dans un bruit sinistre. Quand finalement ce fut terminé, la douleur qui lui vrillait tout le corps le fit tomber dans le sable. Dépliant douloureusement ses jambes, il resta ainsi, haletant et en douleur dans le sable pendant de longues minutes. Ses cotes se soulevaient rapidement tandis que les douleurs refluaient doucement, et surtout le contact de sable humide sur sa peau était des plus agréables. Torse nu, sans chaussure ni chaussette, il resta là, le visage et les cheveux souillés de sable frais.

Il avait trop mal pour bouger, il avait trop mal pour réfléchir. Pour le moment il était immobile, à souffrir en silence, les yeux légèrement voilés de large et de douleur. Mais il était de retour sous forme humaine, et il se disait qu’un bon repas l’attendait dès qu’il serait revenu. Pour le moment, il profitait du soleil couchant sur la mer, et du calme. Quelques oiseaux pépiaient et s’était apaisant...

Assommé par la douleur rémanante, la tête à moitié dans le sable, les bras à demi tendus, reposant doucement dans le sable labouré, quelque chose de lourd se posa à côté de la tête du professeur. Si, dans un premier temps, il à du mal à réaliser ce qu’il se passe, n’ayant pas encore tout à fait fait la part entre ses sensations de loups, et ses filtres humains, ce n’est que lorsqu’il voit une main humaine tenir une bouteille d’eau qu’il réalise : le propriétaire de cette main l’avait surement vu se transformer. Cachant une grimage , il se redressa faiblement dans un rale de douleur. Passer de la station allongée, à celle-ci ses fesses mit une légère distance involontaire avec le nouveau venu. Après quelques secondes ou la tête lui tourna de s’être ainsi redresser, il releva les yeux vers le jeune homme.
C’était un élève, il l’avait déjà vu à l’école, mais il ne parvenait pas, tout de suite, à retrouver son identité, âge ou même sa spécialité. Se raclant la gorge, il repoussa la main tendue, en disant d’une voix rauque, malmenée par les râles qui venaient de sortir de sa gorge :

- Non…merci.

De toute évidence le gamin était loin d’être dégouté, car plutôt que le regarder avec un air bizarre, il se contenta de sortir son repas, un léger sandwich. Bien que la faim ait été le principal moteur de son retour à l’état humain, il n’était pas non plus affamé, et secoua à nouveau la tête, en déglutissant. Son corps recommencait à fonctionner normalement, et cette gêne qui lui tordait l’intérieur finirait rapidement par s’estomper. Après avoir inspirer, déployant ses poumons grandis dans sa cage thoracique, le professeur regarda le jeune homme à ses côtés. IL avait un appareil photo dans sa main, et cela le dérangeait :

- Non, c’est gentil, je mangerai chaud en revenant… Dis… L’appareil…

Merde. IL n’aimait pas avoir des rapports humains si rapidement après avoir quitté la forêt ou les cieux. Même si son corps se remettait à grande vitesse et se réadaptait à ce monde et ses règles rapidement, cela ne restait pas agréable de devoir réfléchir à comment s’exprimer correctement. Et c’étai tpour ça qu’il aimait tant être loup : le langage corporel ne s’encombrait pas de toutes ces tournures.

- L’appareil… Je peux voir son contenu ?

Même si la communication était difficile, notamment parce qu’avoir trois langues dans la tête était compliqué, quatre avec le langage des loups, à mesure que les secondes s’écoulaient, le langage des loups coulait dans sa conscience, et les trois langues humaines revenaient. Et si, sa langue natale le norvégien, revenait plus vite que les deux autres, bientôt le français fut frais dans sa tête, et il n’eut plus trop de mal à réfléchir, ou même à comprendre ce que son bavard de compagnon ponctuel lui racontait. Malheureusement l’inconnu le brusquait bien trop : il parlait trop, lui demandait de réfléchir trop vite, lui demandait de prendre des décisions trop vite. La forêt n’était encore pas si loin, et il avait du mal à ne pas laisser son esprit y retourner, par simple réflexe animal : un danger qui le mettait dans un état de stress le poussait à fuir. Mais il ne pouvait tout simplement pas, ni physiquement, ni changer à nouveau pour retourner sous sa forme de loup.
Prenant quelques temps pour assimiler le flot de parole de l’homme, il secoua simplement la tête négativement, pour lui signifier que pour le moment, il ne voulait rien. C’était plus simple de parler pour le moment avec des gestes universels, au moins le temps que la fatigue se régule toute seule. Puis, tandis que le jeune homme lui glisse l’appareil dans les mains, le professeur se retrouve surpris du poids. Ayant besoin de ses deux mains faibles pour soutenir l’objet, il le dépose délicatement sur ses genoux, et parcoure les photos.

Bientôt, à mesure que sa transformation arrive, une grimace de dégout se dessine sur les traits du blandinet. Il n’avait jamais vu sa transformation à la troisième personne, en revanche il associait sans mal chaque photo à quel os précisément se brisait, et donc il entendait les bruits distinctement. Et, complètement, il ne comprenait pas comment le jeune homme peut se sentir fasciner d’une telle atrocité de la nature… Rendant prudemment l’appareil à son propriétaire, le professeur se racla la gorge :

- Faites… Ce que vous voulez. Mais… Pas publié…

Fatigué, il s’allongea donc, et ce n’est qu’en sentant des mouvements sous ses côtés qu’il réalisa qu’il y avait un scorpion. Là, face à la menace évidente, le professeur sauta en arrière, mettant de la distance avec la bestiole. Il avait bien entendu ce que le jeune homme disait, mais face à un réflexe de survie, ce n’était pas raisonnable.

- Un scorpion…

Tournant son regard vers le jeune homme, Albert réalisa que ce n’était pas un élève, qu’il était trop vieux, et qu’il avait confondu avec l’un de ses gamins. Mais avant toute chose, c’était la question qui le taraudait :

- C’est… ton pouvoir ?

Bouger brusquement n’était jamais une bonne idée, dans son état, mais finalement cela lui avait permit d’éveiller ses sens qui s’engourdissaient progressivement. Finalement, la menace qui l’avait aidé à rester éveiller était en réalité un scopion qui n’était pas dangereux. Il valait mieux ne pas jouer avec, mais Albert ne pu pas s’en empêcher. La transformation était maintenant finie depuis quelques temps, et la majorité des douleurs fantomes étaient en train de disparaitre. Il n’était pas encore en parfait état, mais au moins, il était moins assommé par les douleurs. Donc, il tendit alors la main, et la plongea dans le sable sous le scorpion délicatement. Il n’avait jamais eut peur des insectes en général, même si ses instincts lui disaient d’être prudent et de ne pas jouer avec un prédateur non plus.
Une fois que le sable se fut écoulé de sa main, il sourit à l’animal. Il se sentait proche du jeune homme, maintenant qu’il savait que la transformation en animal était son pouvoir. Avec un sourire, il parla directement au scoprion :

- Bonjour. Je ne peux pas communiquer avec toi, mais je ne suis pas une menace.

Et pour preuve, il le posa dans ses cheveux épais, avant de tendre la même main vers le blandinet à ses côtés, qui était en train de s’excuser et de lui proposer son aide. Plutôt que lui répondre, Albert se contenta de lui caresser doucement les cheveux, en lui souriant doucement, paisible. La douleur avait maintenant refluer grandement, il était maintenant plus posé et à l’écoute.

- Tout va bien. Tu peux m’être utile, en commençant par me tutoyer, et me donner ton prénom. Moi c’est Albert.

Ouais. Le vouvoiement, il n’était automatique qu’à l’école, devant ses élèves. Autrement, il le perdait très vite dès qu’il commençait une discussion avec quelqu’un. Surtout quand ce quelqu’un était visiblement plus jeune que lui. Après quelques secondes, Albert chercha les signes ou de détente, les épaules qui s’abaissent un peu, les traits qui se délient, ou, dans l’autre sens, les épaules qui se crispent, et les dents qui se serrent, afin de savoir si être touché dérangeait ou non le jeune homme. A savoir qu’il avait toujours le scorpion dans les cheveux, si celui-ci n’avait pas fuit, et après quelques secondes, le professeur reprit :

- Tu n’as pas été intrusif, au contraire. Tu étais au bon endroit au bon moment, ce sont des qualités indéniables pour un photographe. Quelque chose me dit que ces photos peuvent valoir très cher, le jour ou j’aurai tué quelqu’un.

…Il venait vraiment de dire ça à voix haute ? Bon, après ce n’était pas comme s’il avait manqué de tuer quelqu’un il y avait moins d’une heure non plus… Mais bon, pour le moment, ses crocs n’étaient pas souillé, c’était le principal. Après quelques secondes, tandis qu’il coulait un regard sur le jeune homme, il secoua doucement la tête :

- J’ai la sensation que tu te sens très seul, je me trompe ?

[Pardon pour le délais >.< Pour m'excuser j'ai écris beaucoup beaucoup pour que tu aies beaucoup de quoi répondre o/]